Autant le dire tout de suite, les maîtres d’arts martiaux chinois n’ont jamais voulu accorder une place aux diverses formes de lutte au sein d’innombrables styles.
Le maître héritier de la 3ième génération du style naturel Wan LaiSheng disait, non sans certain dédain, que la lutte, c’est pour les gamins!
Et par conséquent, les pratiquants d’arts martiaux ne s’intéressent pas vraiment à la lutte. Celle-ci constitue une discipline à part, plutôt pratiquée par les peuples du nord: plus grands, plus costauds. Mandchous, mongoles et autres peuples nomades au grand Ouest de la Chine comme les ouïghours sont connus pour être d’excellents lutteurs.
La pratique de la lutte est assez ancienne en Chine. On peut remonter jusqu’à l’époque de l’Empereur jaune, soit pratiquement contemporain à l’époque babylonienne. On l’appelait 角抵 JiaoDi.
Les lutteurs 相扑 chinois sous la Dynastie Song
La lutte a toujours été pratiquée en Chine et est devenue une forme de jeu durant la période des royaumes guerriers ( -2600 ans ). C’est pendant la dynastie Tang (618 -907) que la lutte JiaoDi a changé de nom, pour devenir 相扑 XingPu ( 相撲 SuMo en Japonais ). A cette époque, la lutte XinaPu était plutôt pratiquée dans la cours impériale. Et le terme 相扑 ou 相撲 (Sumo en KanJi Japonais ) signifie se sauter dessus l’un vers l’autre. Ce qui décrit assez bien le début de l’assaut.
C’est sous la dynastie Song que la lutte XiangPu s’est largement démocratisée et est devenue indispensable à toutes les manifestations populaires et officielles. Il était très fréquent que la cours impériale fasse appel à des lutteurs de XiangPu pour divertir les convives pour presque toute les occasions.
La lutte des femmes était très prisée notamment sous l’empereur 宋仁宗 ( SongRenZong ). Il adorait sortir de son palais impérial pour participer aux fêtes populaires. La lutte XiangPu féminine était le spectacle qu’il ne manquait jamais de regarder. Les lutteuses étaient légèrement vêtues ce qui l’amusait tout spécialement. Il les faisait même venir dans son palais pour les voir lutter.
Avec le temps, les lutteuses ont énormément gagné en compétence et technique, et ce ne sont plus de simples spectacles populaires qu’elles donnaient, mais de véritables compétitions de très haut niveau.
Mais cela commençait à déranger un homme, et pas n’importe qui: 司马光 SiMaGuang (1019年11月17日-1086年10月11日 )
SiMaGuang était conseiller spécial de plusieurs empereurs sous la dynastie de Song. Très conservateur, il s’opposait à toute tentative de réforme dans l’empire et se veut le gardien inébranlable des traditions confucéennes.
Il demanda à SongRenZong d’interdire la lutte féminine car elle enfreint à ses yeux, les valeurs traditionnelles confucéennes. La mort dans l’âme, l’empereur SongRenZong ne pouvait se permettre de le contrarier et fit interdire la lutte féminine par décret impérial. C’était bien dommage, car certaines lutteuses pouvaient même vaincre leurs collègues masculins !
Après ce coup d’arrêt brutal des compétitions féminines, la lutte XiangPu féminin a cessé d’exister en Chine jusqu’à la création de la république populaire en 1949.
Le XiangPu est arrivé au Japon. Les japonais ont même conservé son nom chinois d’origine: 相扑 ( 相撲 SuMo ). Les sumos sont de véritables stars nationales et bénéficient d’une couverture médiatique phénoménale. Hélas, les lutteuses japonaises n’ont pas le droit de participer aux compétitions professionnelles. Car les femmes sont toujours considérées comme impures dans la religion shintoïste.
Le sumotori est intiment lié au Shintoïsme et était un rituel pratiqué par les paysans pour demander clémence aux dieux et bonnes récoltes pour l’année en cours.
D’après 日本大百科全書(ニッポニカ): l’encyclopédie du Japon.
En 642, sous le règne de l’impératrice Kōgyoku, une démonstration de sumo a été donné à un émissaire de la péninsule coréenne ce qui constitue le premier fait historique de l’existence de Sumotori ( 相撲 ) au Japon.
Tandis que le premier fait historique attestant la pratique de la lutte en Chine date de 208 avant l’ère commune. Dans la province de HuBei, on a déterré d’un tombeau de la dynastie Qin, une fresque où 3 lutteurs étaient représentés.
Et en Chine, où en est la lutte maintenant?
Toujours pratiquée dans l’armée et la rue, elle a connu un fort déclin après 1900 suite aux invasions et guerres dévastatrices.
En 1953, sous l’ère Mao, une première compétition de lutte dédiée aux minorités a été organisée en Chine. Mongoles, Mandchous, diverses communautés musulmanes comme les Hui et Ouïghours ont participé à la compétition.
Le nom a été changé, on appelle la lutte: 摔跤 ShuaiJiao.
La fédération de la lutte chinoise a définit des règles strictes de compétition pour conserver une forme de lutte officielle. Mais les minorités continuent à la pratiquer à leur façon.
L’équipe nationale chinoise de lutte est souvent composée de compétiteurs issus de ces minorités. Voici 2 champions de l’open de la lutte qui a eu lieu en Pologne en 2018. Ils ont décroché l’or dans les catégories 60 et 76Kg. Tous deux sont ouïghours.Mais les mongoles sont aussi très présents.